À partir du mardi 2 mai, les grandes entreprises du numérique doivent se conformer à de nouvelles mesures sur le territoire européen. Ce jour marque l'entrée en vigueur officielle du Digital Markets Act (DMA), également connu sous le nom de Règlement sur les marchés numériques dans l'Union européenne. La loi se trouve actuellement dans une période de "transition", au cours de laquelle différents acteurs doivent travailler ensemble pour mener à bien la mise en œuvre de cette nouvelle législation.
La DMA vise à réguler les grandes entreprises numériques et leurs activités économiques dans l'Union européenne. Plus précisément, elle vise à limiter la position économique dominante de la plupart des plateformes numériques sur le territoire européen, à freiner leurs pratiques anticoncurrentielles - et la dépendance qui en découle - et à mieux protéger les utilisateurs et les consommateurs. Elle a été votée par le Parlement européen le 5 juillet 2022 et finalisée en novembre de la même année.
La DMA va de pair avec la loi sur les services numériques (DSA), qui vise à réglementer la relation entre les plateformes et leurs utilisateurs et devrait entrer en vigueur à la fin du mois d'août 2023.
À partir du 2 mai et jusqu'en mars 2024, les entreprises doivent s'efforcer de se conformer à toutes les exigences de l'AMD. Des sanctions seront appliquées si elles ne le font pas.
Les entreprises concernées sont logiquement les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), ainsi qu'une poignée d'autres entreprises opérant dans au moins trois États membres de l'UE. Il s'agit notamment des entreprises chinoises Alibaba et AliExpress, du vendeur allemand Zalando, du service de voyage Booking et des réseaux sociaux TikTok, Snapchat et Twitter.
La Commission européenne a également annoncé le 2 mai qu'elle publierait la liste exhaustive de toutes les entreprises concernées le 6 septembre au plus tard, selon l'AFP.
Le texte officiel énumère les services concernés : les services d'intermédiation (tels que les places de marché et les magasins d'applications), les moteurs de recherche, les réseaux sociaux, les plateformes de partage de vidéos, la messagerie en ligne, les systèmes d'exploitation (y compris les téléviseurs connectés), les services de stockage de données en ligne, les services de publicité (tels que les réseaux ou les échanges de publicité), les navigateurs web et les assistants virtuels.
Pour les cibler, le législateur impose désormais le label de "gatekeeper". Les entreprises qui peuvent être qualifiées ainsi répondent à plusieurs critères, définis comme tels à l'article 2 du chapitre III du texte officiel :
"Si elle a un impact significatif sur le marché intérieur, si elle fournit un service de plateforme essentiel qui constitue un point d'accès majeur pour les entreprises utilisatrices afin d'atteindre leurs utilisateurs finaux, et si elle jouit d'une position forte et durable dans ses activités ou est susceptible d'en jouir dans un avenir proche.
Des critères de revenus et de nombre d'utilisateurs permettent d'affiner le champ d'application de cette loi. Ainsi, une entreprise est un "gatekeeper" "[si] elle a généré dans l'Union des revenus annuels d'au moins 7,5 milliards d'euros au cours de chacun des trois derniers exercices ou si sa capitalisation boursière moyenne ou sa juste valeur marchande équivalente a atteint au moins 75 milliards d'euros au cours du dernier exercice".
En outre, elle est concernée "si elle fournit un service de plateforme essentiel qui, au cours du dernier exercice financier, comptait au moins 45 millions d'utilisateurs finaux actifs par mois établis ou situés dans l'Union".
Une plateforme désignée comme "gatekeeper" doit désormais respecter un certain nombre d'interdictions et d'obligations. Pour les consommateurs, trois points essentiels sont à souligner :
- Le consentement de l'utilisateur sera désormais obligatoire pour la combinaison de données (provenant de plusieurs services) à des fins de profilage public.
- La liberté de choix de l'utilisateur concernant la préinstallation des applications sur les appareils connectés sera renforcée, ce qui permettra une concurrence plus équitable entre les applications.
- Les utilisateurs auront également un accès plus transparent aux évaluations et aux avis sur les produits et services proposés par les plateformes.
Pour les entreprises visées, la DMA impose les obligations suivantes :
- Interdiction des pratiques anticoncurrentielles, telles que la préférence accordée par la plateforme à ses propres produits et services au détriment des concurrents, ou la restriction de l'accès aux données des utilisateurs pour les concurrents.
- Transparence concernant les décisions de la plateforme sur le classement des produits et services offerts.
- Mise en œuvre d'un processus d'interopérabilité pour permettre aux utilisateurs de changer facilement de plateforme tout en conservant leurs données et informations.
Les entreprises concernées doivent également désigner un point de contact unique au sein de l'Union européenne afin de faciliter les échanges avec les autorités compétentes et la mise en œuvre de mesures correctives en cas de non-conformité.
En cas de non-respect des obligations imposées par la DMA, les entreprises s'exposent à des sanctions pouvant aller jusqu'à 10% de leur chiffre d'affaires global, voire à la possibilité d'être contraintes de scinder leurs activités.
En résumé, la loi sur les marchés numériques représente une étape importante vers une réglementation plus juste et plus équitable des grandes entreprises numériques opérant sur le territoire de l'Union européenne. En imposant des obligations claires et précises, ainsi que des sanctions dissuasives en cas de non-respect, la loi sur les marchés numériques vise à garantir une concurrence loyale et à mieux protéger les utilisateurs et les consommateurs.